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Les mathématiques au service des entomologistes

La modélisation : Les mathématiques au service des entomologistes

Les entomologistes élaborent des modèles mathématiques pour des raisons pratiques et théoriques : prédire le développement d’insectes nuisibles et élaborer des scénarios où interagissent plusieurs variables.

Les mathématiques constituent un outil puissant : elles nous permettent de décortiquer des phénomènes complexes et de faire des prédictions. Ainsi, grâce à la description mathématique du mouvement de la Lune et de la Terre, on peut déterminer avec précision le moment et la durée des éclipses solaires. La construction de modèles mathématiques qui intègrent des milliers de données climatiques permet aux météorologues de faire des prévisions de plus en plus fiables. De la même façon, les entomologistes essaient de transcrire en langage mathématique le développement des insectes nuisibles et d’élucider leurs interactions avec leurs ennemis naturels.

Synchroniser les interventions

Comme le disent si bien les Américains, « timing is everything ». La plupart des interventions pour protéger les cultures exigent une synchronisation parfaite avec le développement des insectes ravageurs. Or, comme les insectes n’exercent aucun contrôle sur la température de leur corps, la vitesse de leur développement et leurs activités — vol, ponte, alimentation — dépendent en grande partie des conditions climatiques.

Depuis 1998, le logiciel ORRA, pour Centre Informatique de Prévision des Ravageurs en Agriculture, permet d’estimer, en fonction de différentes données météorologiques, le stade de développement de plusieurs insectes qui ravagent les cultures maraîchères et fruitières les plus répandues au Québec : crucifères, carotte, oignon, maïs sucré, pomme de terre, tomate, fraise et pomme. Au cœur de ce logiciel, des modèles mathématiques descriptifs réalisés à partir de l’étude de la vitesse de développement de ces insectes à différentes températures.

Depuis peu, l’automatisation et la mise en réseau des stations météorologiques d’Environnement Canada permettent d’obtenir presque instantanément des données météorologiques locales. En les entrant dans le logiciel, on peut prévoir au jour le jour si un insecte atteindra un stade de développement nuisible dans une région donnée. Cependant,
les modèles de ORRA ont souvent été testés dans des conditions expérimentales idéales et doivent maintenant être adaptés aux conditions réelles. Ainsi, le modèle de prévision de la pyrale du maïs nécessite des ajustements, car on a récemment observé que la pyrale de type « nordiste », que l’on retrouve près de Québec, semble se développer plus rapidement que la pyrale qui sévit dans le sud de Montréal.

« À moyen terme, nous visons à rendre l’utilisation de ce logiciel aussi simple que la navigation sur Internet. Le producteur n’aurait alors qu’à accéder au site et à introduire les paramètres de sa requête (culture, insecte, région) pour obtenir les prévisions valables pour son exploitation », explique Gaétan Bourgeois, chercheur en modélisation de systèmes agricoles à Agriculture et Agroalimentaire Canada.

Expliquer les échecs

En 1939, un insecte ravageur d’Europe, le diprion du pin sylvestre, s’est introduit au Canada. Un programme de lutte biologique classique a aussitôt été mis en branle : on a relâché des ennemis naturels européens de ce ravageur dans l’espoir que ces derniers s’installent ici de façon permanente. L’ectoparasitoïde larvaire Exenterus abruptorius était particulièrement prometteur. En Europe, le taux de parasitisme naturel atteignait 97 %.

Cependant, même s’il peut hiberner sous nos latitudes, ce parasitoïde est encore très rare dans nos forêts. Pourquoi cette différence ? Jacques Régnière, entomologiste et modélisateur au Centre de foresterie des Laurentides, s’est interrogé sur le synchronisme entre le parasitoïde et son hôte. Une simple observation lui a mis la puce à l’oreille : au Canada, les infestations de diprions ne se produisent que dans de Jeunes Peuplements de pin sylvestre. Il y a donc dans les jeunes peuplements un élément qui nuit aux parasitoïdes.

En raison d’un couvert végétal plutôt ouvert, le sol des jeunes peuplements est exposé au soleil et atteint des températures plus élevées que celui des vieux peuplements, plus ombragé. Or, c’est justement sur le sol, après la chute des larves de diprion à la fin de juin, que le parasitisme et le développement larvaire du parasitoïde se produisent.

L’étude du développement d’Exenterus abruptorius a révélé que son développement cesse à des températures supérieures à 20 °C et que, sur un sol exposé au soleil, il entre en hibernation à un stade de développement plus jeune.

À partir de ces données, de celles du développement de l’hôte et des températures moyennes de sols ombragé et exposé, des simulations ont établi que la synchronisation du parasitoïde avec son hôte était moins bonne dans de jeunes peuplements de pin sylvestre.

Reste à vérifier cette hypothèse en Europe, où l’abondance du parasitoïde permet de comparer son développement dans des forêts d’âges différents. Si elle s’avère juste, on sera mieux outillé pour choisir et importer un autre ennemi naturel du diprion : on évitera toute espèce dont le développement cesse à 20 °C.

Par Charles Allain et François Fournier, revue L’entomologie au Québec, mai 1999.

Le travail sur le terrain : récolter les données requises pour la modélisation et vérifier des hypothèses complexes en situation réelle. Sur la photo, la récolte les insectes capturés au moyen d’un piège Malaise.


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