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Paraphrénie

Paraphrénie en psychiatrie

Du grec à côté et esprit.

– Situation nosologique. – La notion de paraphrénie a très sensiblement évolué depuis sa création. Aussi ne put-on bien la saisir sans un rappel historique relatant les préoccupations nosologiques desquelles elle est née. Dans sa première conception (1889), Kraepelin répartissait les délirants chroniques en deux groupes : d’une part, celui de la paranoïa, caractérisé par l’élaboration d’un délire solidement charpenté, évoluant d’une manière progressive systématique, avec ordre et clarté, mais sans hallucinations et sans affaiblissement intellectuel; d’autre part, le groupe de la démence paranoïde, rangé dans le cadre de la Dementia Praecox et dans lequel Kraepelin ressemblait indistinctement tous les délires incohérents, mal systématisés, hallucinatoires, accompagnés d’affaiblissement intellectuel et évoluant vers la démence.

Plus tard (1909), Kraepelin révisa ce dernier groupe et en isola, sous le nom de paraphrénies, une entité nouvelle qu’il rangea en marge de la démence précoce et qui comprenait des délires chroniques endogènes avec affaiblissement intellectuel et affectif remarquablement peu marqué. Il établissait 4 formes :

1) La paraphrénie systématique dans laquelle se développe un délire de persécution progressif avec idées de grandeur, sous-étendu par des hallucinations qui la distinguent de la paranoïa.

2) La paraphrénie confabulante, définie par des récits imaginaires sans cesse enrichis, mais sans hallucinations.

3) La paraphrénie fantastique, comportant des idées délirantes extravagantes, incohérentes, avec hallucinations multiples, en dehors desquelles le malade reste, cependant, parfaitement lucide.

L’histoire ancienne, ce miroir où l’on aime à voir le temps présent représenté. (Joseph Joubert, écrivain français). Photo d’ElenaB.

Parallèlement à ce travail de clarification, Gilbert Ballet introduisit (1911) sa psychose hallucinatoire chronique, centrée sur le processus hallucinatoire, tendant à se systématiser, mais évoluant plus ou moins rapidement vers l’affaiblissement intellectuel. Elle répondait aux mêmes préoccupations que Kraepelin et se séparait nettement, d’une part, de la psychose interprétative non hallucinatoire, d’autre part, des formes délirantes de la démence précoce.

Paraphrénie kraepelienne et psychose hallucinatoire chronique ont été particulirement démembrées, en France notamment par l’école de Claude (Nodet, 1938). Partant de l’idée que l’hallucination est toujours difficile à séparer des illusions, interprétations et intuitions, Nodet aborde les délires chroniques non pas d’après leur séméiologie, mais du point de vue de leur organisation structurale. Il parvient ainsi à une conception tripartite :

1) Délires à structure paranoïaque, bien systématisés, cohérents, sans affaiblissement psychique notable. « Ils regroupent, hallucinatoires on non, les délires passionnels, les délires d’interprétation, certains délires d’influence, et une partie des psychoses hallucinatoires chroniques. Les paraphrénies systématiques de Kraepelin rentreraient dans ce groupe ».

2) Les délires de structure paranoïde, foncièrement incohérents, traduisent une altération profonde de la personnalité. Dans leurs formes proprement démentielles, ils appartiennent au cadre de la démence précoce (hébéphrénie délirante). Mais ils se présentent également sous une forme à évolution lente, respectant longtemps le fonds mental : « Ce sont les psychoses paranoïdes qui correspondent aux paraphrénies expansive et fantastique de Kraepelin et qui demeurent dans les marches lointaines de la Dementia Praecox. »

3) Enfin, les délires de structure paraphrénique sont caractérisés par un contraste étrange entre l’excellente adaptation au monde réel, la conservation de la lucidité et du fonds mental, et d’autre part, l’élaboration de constructions délirantes fantastiques, impénétrables, le plus souvent grandioses, dramatiques, cosmiques, exprimées dans un langage hermétique et par des dessins extravagants. Le malade a une conscience partielle de son délire à propos duquel il ironise parfois. Il vit véritablement dans deux mondes : celui de ses phantasmes et le monde réel. Il passe de l’un à l’autre avec une étonnante désinvolture, sans que son délire n’altère, pendant longtemps, l’efficacité de son comportement pratique et social : aussi est-il, en général, peu dangereux.

Le soubassement affectif de la structure délirante peut être très variable et permettrait, selon Nodet, de distinguer :

1) La paraphrénie schizophrénique où le délire s’exprime dans une pensée autistique avec stéréotypies, néologismes, bizarreries. Elle correspond à la paraphrénie fantastique de Kraepelin.

2) La paraphrénie expansive ou maniaque qui manifeste une certaine exaltation, l’euphorie, parfois l’ironie et les calembours du syndrome maniaque, mais sans l’agitation ni les désordres de la tenue.

3) Le syndrome de Cotard, avec son délire de négation et d’énormité absurde, ses idées de transformations d’organe, d’immoralité, est caractérisé à sa phase tardive par l’émoussement progressif de l’anxiété; la mélancolie ne retentit plus sur le comportement et se cantonne dans un domaine purement idéologique. L’activité de l’adaptation sont normales; c’est pourquoi Nodet en fait une paraphrénie mélancolique.

– Aspects étiologico-cliniques. – Les délires à structure paraphrénique sont l’apanage de l’âge mûr. Ils se développent généralement entre 30 et 40 ans. Le processus en cause (qui, pour les auteurs allemands, ne serait autre que le processus schizophrénique) ne semble pouvoir réaliser le tableau paradoxal de la paraphrénie que sur le terrait d’une personnalité affective déjà solidement affirmée et mûrie, susceptible de lui résister longtemps. La constitution psychique contribuerait, elle aussi, à sauvegarder la personnalité du processus dissociatif : il s’agit presque toujours de cyclothymes pycniques. Mais, par ailleurs, la constitution n’en est pas moins un facteur prédisposant : on trouve dans les antécédents des traits psychopathiques et souvent une hérédité mentale chargée; le processus morbide n’évolue donc que sur un terrain favorable.

Les débuts de l’expérience délirante restent longtemps latents. On ne remarque que quelques altérations caractérielles : isolement, méfiance, air préoccupé et rêveur, quelques bizarreries ou allusions tendancieuses dans les propos.

Puis le délire éclate un beau jour : thèmes mégalomaniaques, d’influence, de persécution, révélations fantastiques, etc., souvent au cours d’un accès d’angoisse ou d’exaltation (par exemple, lors d’une entrevue donnée par un dictateur paraphrénique aux médias).

Pendant une longue période, le malade réserve ses déclarations délirantes à son entourage familier et se comporte normalement à l’extérieur, poursuivant ses occupations habituelles avec un rendement satisfaisant. Mais à mesure que l’expérience délirante s’intensifie, l’autocritique baisse : la vie sociale devient difficile et l’internement finit par s’imposer, bien qu’il n’y ait pas de réactions agressives (ce qui n’est pas toujours le cas).

Le pronostic mental est toujours très mauvais.

Les méthodes thérapeutiques employés sont celles de la schizophrénie (électrochocs dans le passé, insuline, psychochirurgie). Mais elles donnent des résultats très décevants.

Il faut avouer qu’on a bien pénétré dans la difficulté, en disant ce qui ne se peut point; mais il ne paraît pas qu’on l’ait levée en expliquant ce qui se fait effectivement ceux qui nous donnent des sciences ont coutume aussi de nous donner aussi des définitions ( Gottfried Wilhelm Leibnitz Lettres et textes divers). Photo  de Megan Jorgensen.


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