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Les médias au Soudan : Quatre mois de violation du droit d’informer

Déclaration commune

A l’initiative de la Dabanga – Radio TV Online, en partenariat avec le Syndicat des Journalistes Soudanais, les Journalistes pour les Droits de l’Homme au Soudan- JAHR – Soudan, les rédacteurs en chef et les dirigeants de maisons de presse et de médias indépendants ainsi que des organisations de défense de la liberté de la presse soudanaise, ont discuté des conditions de fonctionnement de la presse et des journalistes au Soudan dans la guerre catastrophique en cours depuis le 15 avril 2023. Ils ont adopté la présente déclaration conjointe en date du 15 août 2023 :

Quatre mois après le début des affrontements, les journalistes soudanais, tout comme les autres civils, sont pris dans la tourmente créée par les parties au conflit. Ils sont accusés de trahison, de collusion et de loyauté envers l’une ou l’autre des factions, et font face à des menaces d’arrestation arbitraire, de disparition forcée ou même de mort, selon les caprices changeants des deux camps. Les femmes journalistes sont exposées à des risques accrus en raison des discriminations basées sur le genre. Les femmes et les filles au Soudan, y compris les femmes journalistes, sont exposées à toutes les formes de discrimination et de violence sexuelle, notamment aux menaces d’exploitation sexuelle et d’asservissement.

Au cours de cette période, de nombreux journalistes ont perdu la vie, ont été blessés et arrêtés. D’autres ont été traqués et ciblés pour de simples commentaires ou pour avoir exprimé des opinions différentes de celles de l’une des parties engagées dans le conflit. Des résidences, des biens ainsi que des équipements professionnels nécessaires aux médias ont été pillés. De ce fait, après quatre mois de souffrances, de nombreux journalistes ont fui vers les pays voisins, contraints d’abandonner leur profession, ou obligés simplement de disparaitre dans la nature.

Face à cette situation désastreuse, les journalistes basés dans l’État de Khartoum et d’autres zones de conflit se trouvent dans l’incapacité de se déplacer librement entre, ou à l’intérieur, des zones de combat pour couvrir l’actualité. Cette contrainte découle de l’absence de protection adéquate et du non-respect des conventions internationales qui garantissent la liberté de la presse et d’expression par les parties impliquées dans le conflit. Ces dernières ne respectent pas non plus l’intégrité physique des journalistes dans le cadre de la couverture médiatique indépendante des conflits armés. Il est important de noter que le Soudan a pourtant ratifié des conventions internationales garantissant ces droits.

Les sièges des journaux, des stations de radio et des chaînes de télévision publiques et privées, tant dans la capitale que dans d’autres régions du pays, ont complètement cessé de fonctionner ou sont actuellement hors service. Cette situation résulte soit de leur emplacement au cœur des zones de conflit, rendant un accès difficile, soit des attaques directes, des pillages, des actes de sabotage, ou encore de l’occupations forcée par des groupes armés. Cela est tragiquement illustré par l’occupation des bâtiments et des studios de la Radio et de la Télévision Soudanaise par les Forces de soutien rapide, ainsi que le contrôle des installations de la Société de Radiodiffusion et de Télévision à Omdurman. Cette dernière fournit les fréquences utilisées par les stations de radio et les chaînes de télévision privées pour diffuser leurs programmes.

En outre, dans les régions centrale, orientale et septentrionale du Soudan, où des centaines de milliers de déplacés qui ont fui la guerre se sont installés, les autorités s’efforcent de réduire au silence les journalistes, les empêchant d’informer le public et de rendre compte de la souffrance de ces déplacés forcés, de leurs histoires déchirantes, ainsi que des horreurs de la guerre. Les services de sécurité et du renseignement militaire, ladite Commission pour l’Aide Humanitaire et les gouvernements locaux imposent d’énormes restrictions et exercent des pressions à l’encontre des journalistes dans ces régions. Tout cela rend quasiment impossible la couverture médiatique ainsi que le travail journalistique professionnel et indépendant.

Les régions et les villes dévastées par le conflit au Darfour, en particulier El Geneina, Sirba et Morni dans l’État du Darfour occidental sont le théâtre d’atrocités, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité perpétrés par les Forces de soutien rapide (FSR) et les milices alliées. Cette situation a entraîné le déplacement de centaines de milliers de civils vers le Tchad voisin. De plus, les FSR et les milices alliées ont perpétré des atrocités similaires dans le Darfour du sud, le Darfour central et le Darfour du nord. Cette série d’événements a rendu cette région totalement inaccessible aux médias et aux journalistes, d’autant plus que ces violences de masse ont été accompagnées de la coupure des réseaux téléphoniques. Face à cette situation, de nombreux journalistes ont été contraints de fuir vers des pays voisins ou d’autres régions du Soudan.

Face à cette situation désastreuse, nous, soussignés de cette déclaration conjointe, adressons les demandes urgentes suivantes aux parties impliquées :

Premièrement : Aux parties au conflit – les Forces armées soudanaises et les Forces de soutien rapide.

• Mettre immédiatement un terme aux hostilités, autorisant ainsi un accès humanitaire général et permettant aux médias et aux journalistes d’informer le public au Soudan et dans le monde de la situation réelle.

• Ouvrir les centres d’accueil des personnes déplacées aux journalistes, favorisant ainsi une couverture médiatique libre et impartiale, dénuée de toute entrave ou censure, dans les régions centrales et orientales du Soudan. Autoriser les journalistes et les professionnels des médias à relayer les témoignages et les récits des citoyens concernant la guerre, leurs souffrances et leurs perspectives pour l’avenir dans ces régions.

• Garantir aux journalistes la liberté de mouvement en toute sécurité, accompagnés de leur matériel de reportage, pour une couverture médiatique indépendante. Autoriser un accès sans restriction, censure ou condition à toutes les zones sinistrées, y compris les villes et les villages du Darfour, du Nord Kordofan, de sa capitale El-Obeid, et des Monts Nouba du Kordofan méridional et du Nil Bleu.

• Mettre immédiatement fin à toute forme d’agression contre les journalistes, ainsi que contre les médias, qu’il s’agisse de chaînes de télévision, de stations de radio, de presse imprimée ou électronique. Permettre aux journalistes de travailler en toute liberté afin de réaliser une couverture indépendante de la situation actuelle.

• Garantir la sécurité des journalistes, de leurs locaux, de leurs équipements et de tous les moyens nécessaires aux médias, conformément au droit international humanitaire.

• Reconnaître les stations de radio et de télévision, les chaînes satellitaires, les journaux imprimés ou électroniques ainsi que d’autres plateformes comme des entités civiles, bénéficiant ainsi d’une protection générale contre toute attaque. Interdire et condamner toute agression de ces entités ainsi que leurs employés. Autoriser Les journalistes à accéder à leur lieu de travail afin de les inspecter. Assurer la sécurité de leurs installations et évaluer les éventuels dommages.

• Autoriser l’entrée sur le territoire soudanais des médias étrangers et des correspondants étrangers, leur permettant ainsi de couvrir les événements en cours et d’accéder librement à toutes les zones de conflit sans restriction.

Aux journalistes et aux maisons de la presse et des medias

             Nous lançons un appel aux journalistes et aux divers organes de presse et de médias afin qu’ils adhèrent fermement aux principes et aux valeurs du journalisme professionnel indépendant. Cela contribuera à combattre la propagation de rumeurs et de la désinformation, en particulier sur les réseaux sociaux, qui ont gravement perturbé la diffusion de l’information. Cette perturbation a fait du journalisme professionnel l’une des principales victimes de cette guerre désastreuse. Il est impératif que tous les journalistes respectent scrupuleusement les normes professionnelles.

             L’absence de médias nationaux a laissé la porte ouverte à des médias biaisés et à la propagande au service d’agendas étrangers. Cette situation souligne une fois de plus le besoin impératif de soutenir la presse et les médias soudanais, afin qu’ils puissent exercer leur rôle intégralement et mettre ainsi un terme au flot de désinformation auquel les citoyens soudanais sont constamment exposés.

             La tragédie de la guerre en cours au Soudan a mis en évidence le manque de compétences et de ressources dans la couverture des conflits armés par nos journalistes et nos médias. Cette lacune nécessite une action rapide pour mettre en place de façon urgente des formations intensives afin de permettre une couverture adéquate des conflits armés. De plus, il est impératif de fournir aux journalistes les ressources et les équipements nécessaires pour assurer leur sécurité lorsqu’ils travaillent dans des zones de guerre.

             Les organisations professionnelles de journalistes ont un rôle crucial à jouer dans cette initiative. Grâce à une collaboration avec des organisations internationales de presse, elles doivent s’efforcer d’offrir des opportunités de formation et mettre à disposition des dispositifs et des équipements spécialisés. Cette collaboration renforcée contribuera non seulement à améliorer la qualité de la couverture médiatique des conflits armés, mais aussi à garantir la sécurité des journalistes qui risquent leur vie pour rapporter les événements sur le terrain.

             Les médias soudanais et les journalistes ont la responsabilité de collaborer pour élaborer un discours médiatique professionnel et unifié, qui combat le discours de haine et au racisme.

À l’attention des forces civiles soudanaises :

o             En tant que composante essentielle de la société civile, les médias doivent occuper une place au sein des initiatives des forces politiques et des organisations civiles, et être intégrés dans leurs programmes. Il est crucial de revendiquer un espace pour les médias et de garantir leur protection en tant que droit humain fondamental. Cet engagement ne se réduit pas à soutenir l’exigence de liberté médiatique, mais implique également de faire de la cause des médias indépendants et libres une question centrale qui interpelle l’ensemble de la société civile et de ses forces politiques, et qui doit être l’une de leurs préoccupations prioritaires.

o             Exercer une pression soutenue sur toutes les parties impliquées dans le conflit, afin qu’elles mettent un terme absolu aux attaques contre les journalistes durant leurs missions sur le terrain. Il est impératif de garantir un environnement sécurisé pour leur travail, leur permettant de rapporter les événements en toute liberté et sans entraves ni intimidations. Il est primordial de fournir toutes les conditions requises pour faciliter leur travail journalistique de manière optimale, en éliminant toute forme d’ingérence ou de harcèlement.

o             Il est impératif de garantir la sécurité des femmes journalistes en les préservant de toute forme de violence, qu’elle soit verbale, sexuelle ou physique. Il convient de travailler en étroite collaboration avec les organismes nationaux et internationaux spécialisés pour mettre en place des mesures de prévention et de soutien. Cette coopération doit s’étendre à la fourniture de toutes formes possibles d’assistance à la presse et aux journalistes tant au Soudan que dans les pays voisins et la région. Il est également crucial de mettre en place un cadre juridique solide pour leur protection.

o             Placer au premier plan la lutte contre les discours de haine et le racisme, d’autant plus qu’ils sont exacerbés par la guerre et mettent en péril la stabilité même de l’État. Ce combat doit être érigé en priorité majeure pour les forces politiques, les organisations de la société civile et les comités de résistance. Il est impératif d’agir résolument contre ce fléau, en établissant un partenariat solide et en coordonnant les efforts avec les médias et les journalistes, tant pendant cette phase critique que dans la période post-conflit. Il est primordial de travailler conjointement à l’élaboration d’un discours médiatique professionnel qui s’oppose vigoureusement aux discours de haine et au racisme. Ce partenariat permettra de contrer efficacement ces notions préjudiciables et de promouvoir des valeurs de tolérance et d’harmonie au sein de la société.

o             Les forces politiques soudanaises, les organisations de la société civile et les comités de résistance doivent dès maintenant envisager l’après-guerre, en incluant dans leur réflexion la presse post-conflit et le concept de « journalisme pour la paix », ainsi que les impératifs qui en découlent, conformément aux valeurs d’une société démocratique. En collaborant activement, ces acteurs peuvent contribuer à restaurer la démocratie dans notre pays, en assurant une transition vers une ère de paix et de progrès.

À la communauté internationale :

•             Nous insistons sur l’importance de faire pression sur les parties en conflit afin qu’elles respectent scrupuleusement le droit international humanitaire. Il est essentiel de garantir la liberté des journalistes dans l’exercice de leur métier et de préserver leur droit de couvrir les événements en toute indépendance, sans entraves ni censure.

•             Les instances internationales, en particulier celles relevant de l’ONU, chargées de la sécurité et de la protection des journalistes, doivent diligenter des enquêtes approfondies sur les actes criminels perpétrés à l’encontre des journalistes et des travailleurs des médias au Soudan. Il est primordial de faire pression pour que les responsables de ces actes soient traduits en justice.

•             Nous faisons appel aux syndicats de la presse et des médias de tous les pays, ainsi qu’aux organismes internationaux dédiés à la presse, à sa liberté et à sa protection, pour manifester leur solidarité envers les journalistes au Soudan. Nous les exhortons à collaborer pour mettre en œuvre toutes les revendications énoncées dans cette déclaration conjointe, de manière à garantir la liberté et l’indépendance de la presse, ainsi que la sécurité et la protection des journalistes.

•             Nous incitons ces organisations internationales à fournir un soutien aux institutions médiatiques soudanaises en vue de renforcer leurs compétences dans la protection et la sécurité des journalistes.

•             Nous leur demandons également d’explorer des solutions et des mécanismes pour assurer la sécurité et la protection des journalistes qui continuent de travailler au Soudan ou qui ont fui les zones de conflit. Il est crucial de faciliter leur mobilité à l’intérieur du pays, aux points de passage, ainsi que vers les pays voisins et la région. Cette facilitation est essentielle pour qu’ils puissent exercer leur métier en toute sécurité. En outre, il faudrait accorder une attention particulière à la protection des femmes journalistes, en évitant qu’elles soient exposées à des formes de violence sexiste, qu’elles soient verbales, sexuelles ou physiques. Il est primordial de coopérer avec les organismes nationaux et internationaux spécialisés dans le domaine de la réhabilitation et du soutien aux victimes de tels actes.

•             Nous appelons à anticiper les tâches de la période post-conflit en prenant en considération les obstacles techniques et financiers auxquels sont confrontés les médias soudanais dans la reprise de leurs activités. Aussi, il est urgent d’accélérer la mise en place de diverses formes de soutien technique et matériel destinées à la presse et aux journalistes, afin de faciliter la poursuite de leurs fonctions avec un niveau accru de professionnalisme et d’efficacité. Il est essentiel de créer un environnement propice qui favorise la pratique journalistique dans une atmosphère de collaboration et d’harmonie.

•             Les organisations internationales doivent jouer un rôle actif dans la formation et le développement des compétences des journalistes et des professionnels des médias, afin qu’ils puissent rédiger de manière professionnelle aussi bien en période de conflit que de paix. De plus, il convient d’intensifier la formation axée sur la lutte contre les discours de haine, le racisme et toutes les formes de discrimination basées sur le sexe, la race, l’identité, la culture ou le genre.

Nous sommes fiers de rendre publique cette déclaration commune, le mardi 15 août 2023.

Les médias et les institutions de presse ayant adopté cette déclaration :

1 – Dabanga – Radio TV Online – Kamal Elsadig, Editor in Chief

2- Sudanese Journalists Syndicate – Abdelmoniem Abuedries, Chairperson

3- Journalists for Human Rights – JHR – Sudan, Faisal Elbagir , General Coordinator..

4- Sudan Tribune – Mohamed Nagi, Editor in Chief.

5 – Hala 96 FM – Yasir Aboshumal, Director.

6- Sudanese Center for Training, Research and Development Services, Faisal Mohamed Salih.

7- Sudanile.com – Tarig Elgazoli, Editor in Chief.

8- The Democrat Newspaper – Elhag Warrag.

9- Al-Ayam Center for Cultural Studies and Development – Mahgoub Mohammed Salih -.

10- Teeba Press – Mohamed Latif, Director.

11- Alalg Center for Press service – Madiha Abdalla .

12- Female Journalists Network-Sudan – Sabah Mohmed Adam.

13 – Alrakoba.net – Waleed Elhussain, Editor in Chief.

14 – Aljreeda Newspaper – Ashraf Abdelaziz, Editor in Chief.

15- Al-Tayar newspaper – Osman Mirghani, Editor in Chief.

16- Altaghyeer Newspaper – Rasha Awad, Editor in Chief.

17- Darfur24 – Adam Mahdi , Editor in Chief.

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