Mars 1856, Égypte. La croisière sur le Nil est terminée ! Le jeune artiste Auguste Bartholdi n'a pourtant pas envie de rentrer en France avec ses amis... Lui, il préfère prolonger son voyage en solo, direction l'Arabie.

À l'époque, il est rare pour les Occidentaux de s'avancer aussi loin en Orient, mais Bartholdi est de la graine des aventuriers. Pour être dans les règles, il a même pris ses précautions en obtenant une mission officielle du gouvernement.

Auguste Bartholdi, Bartholdi et Gérôme, 1856, tirage photographique sur papier salé, Musée Bartholdi, Colmar, photo : © Musée Bartholdi
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D'après celle-ci, il doit mener une campagne photographique pour documenter les "monuments et types humains les plus remarquables" des pays visités.

Mais au vu des photos qu'il rapporte en France un mois et demi plus tard, l'artiste avait oublié sa feuille de mission : les portraits sont rares et les monuments manquent carrément à l'appel.

Auguste Bartholdi, Bord du Nil, chadouffes (le "chadouf" est un appareil à bascule égyptien servant à puiser l'eau d'un puits), 1856, tirage photographique sur papier salé, Musée Bartholdi, Colmar, photo : © Musée Bartholdi
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Pour les premiers, explique-t-il, la faute revient entièrement aux gens qu'il a croisés : chaque fois qu'il voulait les photographier, ces derniers riaient et ne tenaient pas la pose. Quant aux monuments… ça ne devait pas l'intéresser, tout simplement !

Auguste Bartholdi, Fontaine publique, 1856, tirage photographique sur papier salé, Musée Bartholdi, Colmar, photo : © Musée Bartholdi
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D'autant que faire des photographies dans ces régions s'avère plus complexe que prévu. Selon le principe du calotype, Bartholdi applique plusieurs produits chimiques sur ses feuilles photographiques. Ainsi mélangés, ils forment une couche d'iodure d'argent dont la sensibilité à la lumière permet de fixer les images de son appareil photo.

Auguste Bartholdi, Mosquée à Louqsor, 1856, tirage photographique sur papier salé, Musée Bartholdi, Colmar, photo : © Musée Bartholdi
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Le souci, c'est que pour réussir cette préparation, il faut ensuite laver les feuilles dans l'eau douce. Or, la plupart du temps, Bartholdi ne trouve que de l'eau saumâtre, légèrement salée. Dans ces conditions, l'artiste a donc réservé les feuilles aux sujets qui l'intéressent vraiment : coins de rue, maisons, barques…

Auguste Bartholdi, Marché de grains dans la rue, 1856, tirage photographique sur papier salé, Musée Bartholdi, Colmar, photo : © Musée Bartholdi
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Bref, des impressions de voyage que le touriste de vingt ans souhaite partager à son retour. Et tant pis pour les monuments ! Un comble pour celui qui deviendra célèbre trente ans plus tard avec sa Statue de la Liberté.

Auguste Bartholdi (sculpteur), Eugène Viollet-le-Duc (architecte) et Gustave Eiffel (ingénieur), Statue de la Liberté, 1886, feuille d'or (pour la flamme), piédestal en béton et granite, revêtement en cuivre, structure en acier, 93 m de haut, New York, photo : Luis Cortés
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Pour en savoir plus :

Bartholdi n'est pas le seul à vouloir garder une trace de ses voyages ! Bien avant l'invention de la perche à selfie, des appareils photo se glissent dans les bagages des explorateurs.
C'est justement le sujet de l'exposition du musée du quai Branly - Jacques Chirac, Ouvrir l'album du monde (1842-1911).

À partir de trésors photographiques méconnus, elle lève le voile sur la soif d'images des Occidentaux... Et raconte aussi comment le médium a été adopté en cours de route par les peuples du monde entier ! Un périple étonnant et passionnant à découvrir à partir du 4 avril.

En savoir plus sur l'exposition