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Le déficit des années antérieures


Je devrais aborder la question avec d'autant plus de sérénité qu'un rayon de soleil a réchauffé mon cœur depuis quelque temps, or quelles que soient les bonnes nouvelles nous restons fragilisés par les expériences passées. Grandir nous permet de considérer la vie avec plus de distance, une certaine relativité qui manquait souvent à nos jeunes années. Pourtant les déceptions, les coups du sort, les revers subis empêchent de jouir du présent avec la naïveté qui caractérisait nos premiers émois. Même si l'amour et la sexualité vont piocher leurs sources dans une régression salvatrice, le moindre contretemps peut faire remonter nos handicaps que seule la pérennité pourra dissiper, instaurant une confiance en l'autre qui n'est autre que la sienne propre. Ce déficit des années antérieures est à l'origine de tout ce qui nous encombre, ce qui nous échappe et ravive les blessures qu'on imaginait cicatrisées. C'est évidemment aussi ce qu'on risque de faire payer à nos conjoint/e/s sans qu'ils ou elles n'y soient pour rien.
Ayant profité avec succès de la pratique de l'EMDR sur des traumatismes physiques, j'ai imaginé que cette forme d'auto-hypnose pouvait atténuer de même les douleurs morales. Le protocole implique de se souvenir de la première fois où le problème est survenu. En remontant à l'origine des traumatismes on peut ainsi espérer se débarrasser de leurs effets pernicieux. La psychanalyse classique procède-t-elle autrement ? Ce n'est pas seulement la crainte de la reproduction de ce que nous avons subi qui nous afflige, car nous avons tendance à répéter cette situation douloureuse en nous y (in)confortant nous-même, comme si la fatalité nous y condamnait. Est-ce la nécessité inconsciente de revivre le trauma pour en comprendre les tenants et aboutissants ? Ce serait rassurant s'il en était ainsi. Ou bien nos défenses immunitaires seraient-elles défaillantes dans la structure du sujet au point de recommencer stérilement les mêmes absurdités ? La névrose m'apparaît évidemment toujours familiale, sans compter les traumatismes accidentels. Les mécanismes psychiques sont bien complexes pour en comprendre les rouages pervers. Néanmoins il me semble que remonter la chaîne causale offre une issue salvatrice.
Devant mes peurs je n'ai donc de solution que de rechercher dans mes premières années ce qui les "justifie". Techniquement il s'agira de mettre des alarmes sur le parcours qui y mène tandis que l'on remonte le temps. J'espère, par exemple, qu'ainsi le sentiment d'abandon qui m'assaille parfois finira par disparaître, comme je me suis débarrassé totalement, depuis dix ans, des crises colériques qui m'attristaient tant et que je ne savais pas enrailler. Bernard Vitet aimait rappeler à quel point nous sommes tous et toutes fragiles, et ces derniers temps je pense très souvent à la phrase de Jean Renoir dans le film La règle du jeu : "Ce qui est terrible sur cette terre, c’est que tout le monde a ses raisons." Ce n'en est pour autant pas une de nous complaire dans les nôtres lorsqu'elles nous font souffrir, et par extension celles et ceux qui nous entourent.


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