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Albert Brooks sans filet


Les Américains n'ont jamais compris pourquoi les Français adoraient Jerry Lewis. Sans ses succès européens Woody Allen n'aurait pas fait long feu. Et il y a Albert Brooks ! On peut donc se demander pourquoi le public ne connaît pratiquement pas ce réalisateur comique majeur, le plus profond certainement. Comme Orson Welles ou John Cassavetes, il a gagné sa vie en faisant l'acteur. Les comiques ont souvent la vie dure. Chaplin dut quitter les États Unis pour raisons politiques. Jacques Tati a fini ruiné. Brooks a interprété des rôles sérieux dans Taxi Driver, Broadcast News, Drive ou A Most Violent Year, même des rôles de méchant. Il a fait des voix pour des films d'animation comme Le monde de Nemo ou Les Simpsons. Mais son véritable génie se découvre dans les films qu'il a réalisés lui-même et dans la plupart desquels il joue.

En 1979 il parodie la téléréalité naissante avec Real Life. C'est le portrait d'un réalisateur de documentaire appelé Albert Brooks, joué par Brooks, qui pendant un an tente de faire un film sur une famille dysfonctionnelle. Ce faux documentaire est génial. C'est un bide. En 1981 il fait Modern Romance, un film sur la jalousie que lui envie Stanley Kubrick (!), il y joue le rôle d'un monteur de cinéma travaillant sur un film de science-fiction. Si je vous susurre que cela tient de l'humour juif, vous ne serez pas étonné, une sorte d'autodénigrement attendri. En 1985, nouveau chef d'œuvre avec Lost in America, l'histoire d'un couple qui abandonne sa vie aisée pour vivre dans une caravane, tombant de Charybde en Scylla. Souvenir d'Easy Rider, c'est l'autre facette de l'Amérique. En 1991, dans Defending Your Life (Rendez-vous au Paradis), il joue un divorcé qui, venant de mourir, se retrouve dans une cité purgatoire appelée Judgment City, confronté à ses peurs alors qu'il en pince pour Meryl Streep. Dans ce film fondamentalement athée la question de sa réincarnation se pose de manière procédurière. En 1996, le quadragénaire retourne vivre chez sa mère, interprétée par Debbie Reynolds (Singin' in the Rain) pour comprendre ses problèmes avec les femmes après son second divorce, or sa mère n'en a pas du tout envie ! Mother, où il joue un auteur de science-fiction à succès, marche mieux que ses films précédents. Freud est évidemment passé par là, comme chaque fois. En 1999, c'est un scénariste sur le déclin qui cherche une authentique Muse grecque, jouée par Sharon Stone (!), pour retrouver l'inspiration, comme le font James Cameron, Martin Scorsese ou Rob Reiner qu'il y croise ! Enfin, en 2005 dans Looking for Comedy in the Muslim World le gouvernement américain envoie Brooks, donc un Juif américain, en Inde et au Pakistan pour comprendre ce qui fait rire les Musulmans. Ce n'est pas le plus drôle, mais l'idée est comme toujours passionnante.


Albert Brooks Defending My Life, le film que son ami d'enfance Rob Reiner lui a consacré, lui rend justice. Rob Reiner, c'est le réalisateur de Spinal Tap, Princess Bride, When Harry Met Sally..., Misery, etc. On peut lui faire confiance. Lui aussi a fait l'acteur. Il montre comment Brooks ose des trucs incroyables lors de ses passages télévisés, sans aucune répétition, se jetant dans l'arène, parce que l'improvisation accouche toujours d'une authenticité quasi magique. Son vrai nom est Albert Einstein, ça commençait bien ! Merci Papa, dont le pseudonyme était Parkyarkarkus, un comédien en langue grecque qui se produisait dans une émission radio d'Eddie Cantor. Évidemment Albert Brooks, évoquant sa vie et ses films, est comme à l'écran, intelligent, drôle et extrêmement touchant.


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