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Lu Xun

« Ah ! C’est un auteur très connu mais qui ne pourrait plus écrire comme il l’a fait, chez nous, maintenant, car il dit des choses pas très jolies sur la Chine. » Mon collègue chinois à qui je parle de ma dernière découverte littéraire connait bien Lu Xun que Wikipedia présente comme père fondateur de la littérature chinoise contemporaine. En France, Lu Xun est plus que confidentiel, seuls deux minuscules fascicules de nouvelles – Lu Xun n’a pas écrit de romans – semblent avoir été publiés récemment chez un petit éditeur, les Editions Sillage. Pour faire plus, il faut aller acheter sur Rakuten des éditions des années 1980 qui se vendent à des prix de braderie.

Le premier fascicule ne contient qu’une toute petite mise en bouche de 6 nouvelles et totalise moins de 100 pages. Dès les premières pages, la réflexion de mon collègue chinois prend tout son sens : Lu Xun est dans la veine naturaliste et pas là pour nous conter une Chine de façade. Les nouvelles du recueil « le journal d’un fou » ont été écrites dans les années 1920, après la chute de la dynastie des Qing, et se penchent sur une population encore bien pauvre et illettrée. Les six nouvelles se passent chez les « courts-vêtus » aux « ongles courts », deux signes de pauvreté quand porter une longue robe et avoir des ongles longs sont deux signes qu’on ne travaille pas dans les champs ou de ses mains, et donc qu’on appartient à une classe sociale supérieure.

La première nouvelle, le journal d’un fou, est toute surprenante : il s’agit des divagations d’un paranoïaque Sur Les 4000 mille ans de cannibalisme qu’aurait vécu la Chine et plus directement, sur les doutes qui l’étreignent alors qu’il soupçonne d’avoir lui-même gouté de sa petite sœur à sa mort, servie dans le dîner par son frère. N’était-ce le titre, le texte très maîtrisé et la pensée très claire de la nouvelle pourraient laisser planer le doute sur le passé cannibale de la Chine raconté par l’auteur.

Les nouvelles suivantes peignent des moments de vie de l’homme de la rue : l’histoire d’un client qui fréquente régulièrement un café et finit par ne plus venir, la mort d’un enfant, la nostalgie d’un adulte qui revient dans le village de son enfance et la distance qui s’installe entre lui et son ami d’enfance qui est resté au village et a moins bien réussi que lui. Si les thèmes des récits pourraient avoir tout aussi bien été imaginés en occident, ils mettent en exergue des coutumes brutales : le remède pour l’enfant malade est un petit morceau de pain trempé dans le sang d’un condamné, ce même condamné a été trahi par un membre de sa famille poussé à la délation car si le coupable n’est pas dénoncé, c’est toute la famille qui se voit condamnée ; un voleur se fait, en guise de punition, casser les jambes.

C’est peut-être ça que les autorités chinoises ne voudraient pas voir étalé aux yeux de l’occident : une époque dont les us feraient écarquiller les yeux de l’occident, il y a moins d’un siècle, narrée par un écrivain qui a eu, à moment donné, envie de raconter ses voisins, ses frères, les siens. Qu’il ne se soit passé qu’un siècle depuis les scènes racontées par Lu Xun en dit long sur les changements par lesquels est passée la Chine depuis lors. La Chine devrait en être fière !



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